Serre-Che Luc Alphand #1

C’est avec envie et une météo optimale que je retrouve ma ville natale de Briançon, pour une double ration de cols haut-alpins, mauriennais et italiens. Ce samedi nous sommes un peu plus de 200 au départ du plus gros morceau de la saison : le Granfondo Val di Susa. Avec 200 km, 4500 m de dénivelé et sa majesté le Galibier pour finir d’achever les organismes, la difficulté a de quoi faire peur et il convient d’en garder sous le pied pour le final.

Serre-Che Luc Alphand #1L’exact opposé se produit dès le col du Montgenèvre : après quelques kilomètres neutralisés la difficulté est courte, mais Loïc teste tout le monde et s’en va en force avec Stefano. Derrière ça casse de partout, je mène un petit groupe de chasse d’une dizaine d’unités préférant amortir l’accélération. Au sommet l’écart se stabilise autour de 20″ et Fabien attaque la descente pleins gaz, suivi de près par Jean-Lou et Valentin.

A l’affût je saute dans leurs roues, souvent à la limite dans les grandes courbes rapides mais tiens bon le rythme : contrairement à l’an passé j’ai flairé le bon coup, même si les écarts restent faibles. En quelques relais appuyés on revient sur le duo de tête : nous voilà six à ouvrir la route, que du beau monde à plus de 180 km de l’arrivée. Derrière nos poursuivants reviennent à moins de 30″, mais finissent par abdiquer après un bras de fer de quelques kilomètres.

L’entente est bonne jusqu’à Suze au son des nombreuses motos ouvreuses et sous les encouragements des spectateurs italiens. Là petit coup de théâtre : Loïc casse son câble de dérailleur, contraint à un abandon prématuré… Voilà qui ouvre les candidatures à sa succession et donne des idées à Stefano, qui accélère dès le pied du col du Mont-Cenis. Jean-Lou est le premier à céder après quelques kilomètres d’une très longue ascension : je l’imite un peu loin, laissant filer le trio de tête lentement mais sûrement. Derrière nous roulons de concert, un peu plus à l’aise dans les pourcentages j’y mène l’allure, Jean-Lou s’occupant des parties plus roulantes. L’écart reste longtemps sous la minute, et nous revenons sur Valentin à une dizaine de kilomètres du sommet. La vue sur le lac est magnifique, mais le vent de face rajoute à la difficulté.

Serre-Che Luc Alphand #1Tandis que l’écart se creuse avec le duo de tête, Jean-Lou fait parler son expérience d’ancien coureur professionnel pour tailler des trajectoires au cordeau dans la descente. Valentin et moi y perdons une bonne poignée de secondes, mais le trio se reforme après Lanslebourg pour une longue et pénible descente de Maurienne balayée par le vent de face. Malgré les relais appuyés de Jean-Lou l’écart se creuse avec la tête, en même temps que l’on grille des cartouches pour le terrible enchaînement final. Derrière ils sont également trois à lutter, au moins tout le monde est logé à la même enseigne. Je pense seulement à bien m’alimenter et donner un coup de main dès que je peux, dans le flot quasi-ininterrompu de véhicules estivants.

Kilomètre 140, St-Michel-de-Maurienne : le virage à gauche sonne presque comme une délivrance, pourtant il reste 34 km d’ascension jusqu’au col du Galibier. A coup sûr tout va se jouer là : dès le col du Télégraphe les masques tombent. Valentin est le premier à lâcher prise, Jean-Lou creuse un petit écart et je tiens bon la quatrième place, pas loin mais incapable d’accélérer… Déjà en mode « gestion » pour la suite je bascule à moins d’une minute au sommet tandis que le duo de tête se livre bataille loin, très loin devant à plus de 5′.

Serre-Che Luc Alphand #1Dans la courte descente sur Valloire l’écart avec Jean-Lou passe brusquement à 2′ mais plus inquiétant : je sens que l’alimentation sucrée sature l’organisme. Un court arrêt au ravitaillement me permet de remplir les bidons et manger un peu de salé (jambon, fromage), histoire de varier un peu… Et la remise en route est laborieuse. Malgré le vent favorable jusqu’à Plan-Lachat ça n’avance pas, alors que cette partie est la moins difficile. Les jambes sont dures, le dos raide après de nombreuses heures de selle et le moral commence à flancher 🙁

Surveillant de temps en temps un éventuel retour de l’arrière, je m’alimente juste avant le virage fatidique au-dessus du torrent. Naviguant à 11-12 km/h dans cette ligne droite à près de 10 %, je sens que les kilomètres jusqu’au sommet du col vont être très longs, avec Joris et Michel qui reviennent fort de l’arrière. Dans un léger « replat » (7 % tout de même) je reste bloqué tout à gauche, incapable de relancer. Le podium est à 2-3′ devant, mais maintenant je songe surtout à conserver ma quatrième place, ou tout simplement arriver au sommet. Les derniers kilomètres sont un calvaire, cette année on passe par le tunnel ce qui soulage tout le monde… Moi compris !

L’atmosphère est fraîche, le temps d’avaler un gel, d’enfiler le coupe-vent et j’entame la descente prudemment. Quelques spectateurs m’encouragent et me disent que Jean-Lou a crampé au sommet ; j’y prête à peine attention tellement je suis sec. Première indication : le vent fort est favorable jusqu’à l’arrivée, voilà une excellente nouvelle 🙂 Joris me dépasse en trombe sur une relance quelques hectomètres plus loin, un peu dans le gaz je suis incapable de réagir et le suivre.

Serre-Che Luc Alphand #1Le top 5 est encore jouable : reste Michel pas loin derrière. Je ne perds pas grand chose jusqu’au Lautaret dans les lacets rapides et balayés par le vent. Maintenaint plus qu’une chose à faire : écraser les pédales et filer à bloc jusqu’à Serre-Chevalier. Poussé par un vent puissant, la vitesse tombe rarement sous les 60 km/h et l’écart se maintient jusqu’à 5 km de la ligne, lorsque je vois apparaître le vétéran du Team Scott Vélo 101 à une poignée de secondes.

Sur cette partie un peu plus plate la force me manque, il arrive finalement à rentrer pour finir en duo jusqu’à l’arrivée. Il n’y aura pas de sprint sur une arrivée tortueuse : à Michel la cinquième place et moi la sixième, en un peu moins de 6h30′. Loin devant Stefano a fait plier un Fabien perclus de crampes au sommet du Télégraphe, pour creuser ensuite l’écart et rallier l’arrivée en grand vainqueur. Jean-Lou n’a pu éviter le retour supersonique de Joris, mais remporte le sprint pour la troisième place.

Une très belle performance pour ma part, surtout après avoir passé un très sale moment dans le Galibier… Je n’y suis jamais à l’aise, mais là j’ai vraiment touché le fond 😛 Heureusement les écarts étaient importants après la vallée avalée à vive allure, expliquant en partie les défaillances de toute le monde (ou presque) parmi le top 10. Le passage à vide fut autant physique que mental, payant sans doute mon manque de pratique sur des épreuves de distance similaire. Reste à bien récupérer pour repartir à l’assaut du Guillestrois dès demain, sur une belle boucle via l’Izoard 😉

Résultat(s) : Serre-Che Luc Alphand – Granfondo Val di Susa

3 réflexions sur « Serre-Che Luc Alphand #1 »

  1. Repousser ses limites, c’est peut être encore passer un cap alors. Belle perf quand même!

  2. 15′ et 4 places de gagnées par rapport à 2014… le choix de partir fort d’entrée était le meilleur a priori, même si à chaud je l’ai longuement regretté vers Plan-Lachat. Toujours tenter le coup (quitte à sortir de la fameuse « zone de confort ») ; et le jour où ça passe ça fait podium 🙂

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