Marmotte

Malgré une saison 2020 très raccourcie et émaillée d’annulations à cause des restrictions sanitaires, la Marmotte a bien lieu ce matin à Bourg-d’Oisans. Environ 2000 participants se massent au départ de l’épreuve mythique alors que le jour n’est pas encore levé ; absent depuis 2013 c’est avec une certaine appréhension que je me range en première ligne avec l’ensemble du Team Vercors, juste avant 7h00 du matin. Comme toute épreuve de plus de six heures je ne sais jamais à l’avance comment le corps va encaisser les 174 km et 5000 m de dénivelé proposés, malgré des centaines d’heures en montagne à l’entraînement.

MarmotteCôté liste de départ guère de surprises : la crème du cyclosport mondial est là avec d’anciens vainqueurs comme Michiel Minnaert… La météo s’annonce idéale pour un début septembre : il fait frais au départ mais le soleil va vite se lever et nous réchauffer dans les différentes ascensions de la journée. Je laisse quelques affaires à notre assistance de choc assurée par Ludovic et Manon Griboval, quelques échanges sur les points de ravitaillements et le départ est donné. Comme d’habitude ça part à fond vers Rochetaillée, avant de tourner à droite vers le col du Glandon.

Après le barrage du Verney ça monte à vive allure, comme dans mon souvenir et ça passe sans souci, je laisse plutôt faire et attends l’écrémage comme tous les favoris. Je mets juste le nez à la fenêtre avec Stefano Sala à la première rupture de pente, tandis que Loïc Ruffaut et Raphaël Addy prennent le large après le Rivier-d’Allemont. Les derniers kilomètres au soleil levant sont splendides et le groupe (une trentaine d’hommes) musarde encore un peu avant de basculer à 1’30 » de la tête au sommet. J’y récupère un bidon et entame la descente en tête ; pour une fois que la route est fermée on en profite un peu pour lâcher les freins 🙂

MarmotteÇa ne dure pas très longtemps car après quelques kilomètres je retombe sur le duo leader, en roue libre derrière deux motos et la voiture ouvreuse. Forcément cela provoque un regroupement conséquent, en même temps que je me refroidis : nous voilà une cinquantaine en tête dans la vallée, à l’ombre et les jambes ont du mal à repartir 😛 Cela n’empêche pas quelques bonnes attaques où j’essaie de suivre et grille quelques cartouches, avant qu’un coup à deux ou trois ne parte réellement vers St-Jean-de-Maurienne. Derrière c’est rideau, les minutes s’accumulent avant le col du Télégraphe.

L’allure y est élevée (5 W/kg) mais pas folle et les kilomètres défilent ; nous sommes toujours une trentaine quand je m’agace et secoue le cocotier à mi-pente. La réaction des cadors ne se fait pas attendre et ça contre pas loin de 6 W/kg avec les Ruari Grant, Tim Alleman, Frédéric Glorieux… Julien Bérard et Yoann Sert sont également présents dans la vingtaine d’hommes qui reste, avec moi (et Loïc échappé) nous sommes les derniers représentants tricolores en tête de course. Je bascule un peu limite au sommet, ça tient jusqu’à Valloire où la circulation est bien moins dense début septembre qu’en juillet : un vrai plus 😉

MarmotteA la sortie ça remonte jusqu’aux Verneys, Raphaël accélère avec Julien et là je suis vraiment dans les cordes mais m’arrache pour tenir les roues avant le faux-plat… repoussant la sanction à plus tard. Loïc caracole en tête avec 5′ d’avance, suivi par un contre à 3′ : si loin de l’arrivée rien n’est fait, mais ça devrait bouger dans le col du Galibier. Un peu dans le dur je filoche en queue de groupe, veillant à bien m’alimenter et m’abriter même si le vent est favorable. Dans cette partie avant Plan-Lachat nous perdons encore quelques unités, plus qu’une quinzaine de coureurs dans le groupe de chasse qui tourne à droite au fameux pont, pour aborder les premières rampes à 9-10 %.

Comme à chaque passage en course je craque sur la première accélération, qui me laisse à 20″. Le groupe temporise ensuite et monte au train, je grappille quelques secondes mais au-delà de 2200 m chaque relance me coûte beaucoup d’énergie. Aux Granges je suis toujours à 15″, les kilomètres défilent et je reprends quelques lâchés du groupe mais sans parvenir à faire la jonction ou prendre le risque d’un long sprint pour rentrer (et exploser ensuite ?)… Au croisement du tunnel, je suis à 10″ mais le dernier kilomètre m’est fatal et je reperds du terrain : ma chance est passée, pas sûr que je puisse boucher le trou dans la descente.

MarmotteJe m’applique au mieux dans celle-ci mais ne reprends rien et passe à 30″ au Lautaret, où le vent est défavorable : là ça devient mission impossible, et derrière je ne vois personne à moins de deux minutes. Le retour jusqu’à Bourg-d’Oisans va être long, très long : je m’emploie à rouler à l’économie, le plus régulièrement possible sans trop en mettre. Après la Grave je reçois le renfort du jeune Arne Bauters, nous appuyons davantage les relais et progressons beaucoup plus rapidement tout en laissant plus de forces, logique.

Au pied de l’Alpe-d’Huez, nous passons à 5′ du groupe des favoris : on s’encourage mutuellement, désormais c’est du chacun pour soi. Avec 5h15′ au chrono je me dis que 6h10′ en haut est jouable en assurant le top 20, mais il ne faudra pas s’endormir avec nos plus proches poursuivants à 2′. Entamé musculairement je maintiens un bon rythme de croisière (4.5 W/kg) jusqu’à la Garde, où je retrouve une dernière fois Ludovic pour un ravitaillement liquide. Mais à ce moment de la course j’ai du mal à relancer dans les parties moins pentues, et la puissance baisse logiquement malgré une vitesse correcte.

Devant Arne s’est envolé, je ne vois personne derrière : un peu seul au monde je décompte les kilomètres et perds le fil, avec quelques petites douleurs au dos qui apparaissent. Malgré tout je reste sur les bases supérieures à 4 W/kg et poursuis ainsi jusqu’à Huez, où j’aperçois David De Vecchi qui se rapproche. A la sortie du village il me dépasse et je ne cherche pas à m’accrocher ; d’autres reviennent derrière dont Jocelyn Verdenal, alors je relance jusqu’au Vieil-Alpe, pour retarder la jonction après le tunnel. Ensuite c’est plus facile, je m’arrache pour rester au contact mais il finit plus fort et franchit la ligne quelques secondes devant moi.

Dix-neuvième en 6h14′, je suis bien content d’en terminer en remplissant à la fois l’objectif chrono (moins de 6h15′) et classement (top 20). Stefano, Cyril Gaillard et David Polveroni me suivent de très près : il ne fallait pas un kilomètre de plus 😛 Même si je regrette encore la débauche d’énergie dans le Télégraphe et cette petite erreur dans le Galibier, ma course reste très solide et constitue ma meilleure Marmotte à ce jour. Je pense qu’il y avait la place pour figurer avec le groupe de chasse au pied de l’Alpe : il faudra donc revenir en 2021 pour tenter de réaliser la course parfaite, ou presque 😉

Résultat(s) : Marmotte

8 réflexions sur « Marmotte »

  1. Bravo. Il te manquait juste quelques supporters pour t’encourager dans le Galibier et dans l’alpe d’Huez…

  2. Merci Gilles, ça oui, je me sentais un peu seul les 50 derniers kilomètres (moi et mon pédalier qui craquait de + en + 😛 ).

  3. Merci pour ce résumé intéressant.
    Impressionnant les chronos, je suis à 1h30 derrière… Loïc Ruffaut et Ruary sont indiqués DNF, tu sais ce qu’il leur est arrivé ?

  4. Ruari s’est pris une boîte (comme à peu près tous les week-ends :/ ) au tout début de la descente du Galibier (avant tunnel)… il a bâché puis couru le lendemain au Ventoux, où il fait 2 sur le 80 km.
    Quant à Loïc… il bâche au virage 4 de l’Alpe d’Huez (aux 2/3 donc) alors qu’il était encore en tête je crois… pas compris, il redescendait pendant que je finissais mon Alpe, il n’avait pas l’air KO ???

  5. Merci Rodolphe pour ce beau résumé! Bonne récup et à bientôt sur une grimpée

  6. Merci Yoann, au milieu de la « légion étrangère » du groupe de tête je ne t’avais même pas remarqué 🙂 énorme perf de ta part, franchement chapeau… Comme tu dis maintenant place aux grimpées (j’en ai tous les week-ends autour de Grenoble jusqu’à mi-octobre en gros).

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