Madeleine

Les prévisions météo de ces derniers jours ne laissent guère planer le doute pour ce premier dimanche d’août : après les fortes chaleurs et le soleil de l’an passé, aujourd’hui il faudra composer avec la pluie et le froid. Cela m’enchante peu et c’est un euphémisme : je suis plusieurs fois tenté de faire demi-tour sur l’autoroute en me rendant au départ… Et puis je me suis levé, les routes semblent sèches en vallée et je retrouve d’autres compagnons de galère au départ : après tout, ça se tente 😉

MadeleineSur la ligne il ne fait pas froid, manchettes et coupe-vent sans manches suffisent mais j’emporte l’imperméable car les sommets sont noyés dans le brouillard dès 1400 m. Car aujourd’hui le menu est copieux : cinq passages entre 1500 m et 2100 m, 135 km et 4700 m de dénivelé : faudra gérer correctement l’effort et la météo ! Comme d’habitude le départ en vallée est rapide et permet de se chauffer dans quelques côtes : les sensations ne sont pas super, au moins aucune échappée ne prend le large sans que je n’aie à mettre le nez à la fenêtre.

De toute manière je ne peux que subir et me placer correctement pour entamer le col du Mollard. De nombreux lacets sur route irrégulière permettent de faire l’écrémage au train, surtout quand Julien Bérard, Cédric Richard ou Loïc Ruffaut s’en mêlent 😉 Dans le groupe de tête je reconnais également Kenny Nijssen, Tim Alleman, Bruno Morel… déjà dans le dur je sens que la partie ne sera pas facile ce matin. Ça se corse davantage en arrivant à Albiez-le-Jeune où nous prenons un bon crachin dans la première rupture de pente, pile où je coince.

Tout en me ravitaillant je fais un gros effort grand plateau pour rentrer in extremis, mais le déluge se précise en traversant le village et je craque à quelques kilomètres de la bascule, déjà trempé. L’écart n’a rien de rédhibitoire mais je galère à enfiler l’imperméable mouillé et descends à contre-temps, tétanisé par le froid. Julien Gaillard me rejoint et nous assurons prudemment la descente : à ce moment-là je songe à abandonner et rentrer directement par St-Jean-de-Maurienne… Mon équipier du Team Vercors m’encourage pour poursuivre vers le col de la Croix-de-Fer, histoire de se réchauffer en montant.

L’allure reste bonne et la pluie finit par cesser ; encore trempé ce n’est pas la chaleur mais les jambes restent efficaces et nous progressons à bon rythme, pas si loin de la tête de course qui passe la seconde après St-Sorlin. Je n’y pense pas : une difficulté après l’autre, on verra bien. Un troisième larron nous rejoint dans les derniers lacets du col : si l’effort nous réchauffe et la route sèche petit à petit, un léger vent nous accueille au sommet. Sans trop penser au froid glacial (4°C) dans la courte descente je me concentre seulement sur la roue de Julien jusqu’au col du Glandon, franchi presque dans l’élan avant une nouvelle descente scabreuse.

MadeleinePresque sèche dans les lacets les plus délicats, il y a toujours ce vent qui m’engourdit les mains 🙁 Peu avant St-Colomban-les-Villards nous prenons à nouveau une averse, cela rend le pilotage un peu plus délicat. Heureusement la route devient plus rectiligne ensuite, quelques rayons de soleil mettent du baume au cœur et nous achevons la descente sans encombre à St-Etienne-de-Cuines. Non sans avoir perdu énormément de temps, puisqu’un petit groupe nous rejoint juste avant la séparation des moyen/grand parcours. Sans état d’âme et contracté de partout je file avec Julien et Alexandre Laurent sur le 115 km, pour rejoindre la voiture au plus vite et achever ce calvaire 😛

Avant de repasser à La Chambre le parcours boucle par quelques longs kilomètres en vallée où j’assure l’essentiel du travail dans notre trio, ce qui me réchauffe petit à petit. Suivi aujourd’hui par sa compagne, Julien me propose de redescendre en voiture à l’issue de la course ; avec de nouveau des sensations dans les mains cela me motive à terminer l’épreuve, d’autant que je ne connais pas l’ascension finale. En effet nous montons au col de la Madeleine par Montgellafrey, un versant méconnu offrant de gros pourcentages. Et puis j’ai également un sac d’affaires à récupérer au sommet, donc pas trop le choix !

Sans stress je m’autorise un arrêt pipi et laisse filer les deux autres, ainsi que Pierre Badel qui a bien géré le froid et l’humidité (étant aussi frileux que moi). Repartant le couteau entre les dents mais sans watts (le capteur ayant décidé de se couper au départ), les 18 km d’ascension se feront aux sensations. Je rejoins Pierre à Notre-Dame-du-Cruet lorsqu’il ramasse un bidon, et poursuis mon effort avec Alexandre et Julien en point de mire. Sans aucune idée du classement je reprends et lâche Alexandre dès les premières rampes, et continue à mon rythme avec Julien à 30″ devant.

Je mets plus de temps à faire la jonction mais c’est chose faite à mi-pente où j’ai quitté l’imperméable sous un rayon de soleil. Il fait nettement meilleur et les vêtements ont séché, maintenant il n’y a plus qu’à s’alimenter et gérer correctement jusqu’au sommet car le froid humide a laissé des traces musculairement. Julien craque dans un replat avant St-François-Longchamp sans que je n’accélère : comme souvent sur cette épreuve le final va se faire seul contre moi-même, avec de nouveau du brouillard jusqu’à la ligne. Faiblissant légèrement les derniers kilomètres j’en ai plein les bottes en la franchissant, pile au moment où le podium scratch du 115 km est annoncé 😉

Le speaker et ultra-trailer Ugo Ferrari annonce Julien Bérard vainqueur devant Jules Brunet-Durand et Thomas Josso. Que des concurrents présents dans le groupe de tête avant bifurcation donc les écarts sont abyssaux (+17′ sur la victoire, +5′ sur le podium) par rapport à ma quatrième place. Julien complète le top 5 quelques minutes plus tard, au moment où on m’appelle pour mon podium (victoire dans la catégorie 30-39 ans). Le temps de récupérer les affaires, se ravitailler et se changer à sa voiture nous avons juste le temps de voir Loïc Ruffaut l’emporter sur le grand parcours, devant Kenny Nijssen et Bruno Morel après une lutte au couteau dans l’ascension finale puisque Bruno pointait encore en tête à Montgellafrey.

Nous croisons également Joris Ronflet (vainqueur du petit parcours) avant de redescendre prendre notre repas à St-François où l’atmosphère est nettement plus agréable (à défaut d’être estivale). Vu le contexte, difficile d’analyser quoi que ce soit : cumulant la fatigue de deux semaines de vacances à fort volume et subissant la météo froide et humide du jour (clairement ma « kryptonite », et ça ne s’arrange pas en vieillissant) je suis loin de mes standards habituels mais m’en contente volontiers puisque je n’étais pas sûr de prendre le départ le matin même. Enfin merci à Julien pour avoir été mon St-Bernard toute la matinée, sans toi j’aurais lâché l’affaire plusieurs fois avant la ligne 🙂

Résultats : Madeleine – moyen parcours

4 réflexions sur « Madeleine »

  1. C’était moi le “troisième larron” du Col de La Croix de Fer hehe!
    Comme d’hab très sympa de lire tes récits post-courses, et bravo pour avoir fini parce que c’est vrai que les conditions étaient vraiment horribles sur la 1ère moitié…

Laisser un commentaire